30/06/2008

combien de fois 4 ans?

ces textes ont été écrits respectivement en juillet 2004 pour le premier, et au printemps 2008 pour les deux suivants.
Les deux premiers textes se ressemblent beaucoup, même si ils ont été écrits à 4 ans d'intervalle.
Le troisième est peut être une synthèse...

juillet 2004
La première fois que j’ai couché avec un garçon j’avais dix-huit ans. C’était le début de l’été… Quand je dis coucher, je parle bien sûr de coït avec pénétration vaginale, moi en dessous, lui au dessus. Les câlins, les préliminaires, c’est des fioritures mais ce n’est pas considéré comme « l’acte sexuel ».
Je ne le connaissais pas, je l’ai rencontré parce qu’il jouait en concert sur Paris. Je l’ai dragué, lui ai fait comprendre qu’il me plaisait beaucoup physiquement, on a parlé d’anarchisme, de végétarisme, de bd (facile pour un punk végan). Je ne sais plus comment , on a fini par se faire des bisous, et puis on a été se coucher. C’était un peu chiant, on n’avait pas vraiment d’intimité, y avait des mecs qui continuaient de picole à côté et qui faisaient des réflexions de beaufs. Je lui ai donc proposé d’aller chez moi.
On y va. J’avais un peu la pression mais je le trouvais beau et marrant. Et puis chez moi, on s’est déshabillés, tripotés, je n’osais pas lui dire que j’avais un peu peur ; je voulais que la « première fois » se passe vite, sans chichi, parce que beaucoup de mecs tirent une gloire ou une fierté de dépuceler une fille. Et je ne voulais pas ça.
J’étais angoissée, et puis à cette époque je connaissais très mal mon corps, surtout mon vagin, j’étais incapable de me détendre.
Il met une capote. Elle était mal lubrifiée et ça me faisait mal avant même qu’il rentre. Je lui ai demandé d’enlever la capote, ça m’irritait trop. Il l’a fait.
On s’est frottés un peu, lui me serrait (j’étais écrasée sous lui), je ne savais pas trop quoi faire, je lui disais d’aller doucement, je gémissais pas mal, le repoussais mais l’embrassais. J’attendais que ça arrive. Mais quand j’ai senti que ça allait arriver, j’ai eu très peur, je ne voulais plus, j’aurais voulu qu’il s’arrête.
J’ai dit non, sans grande conviction, mais je l’ai dit. Pas très fort, mais plusieurs fois.
Et puis il m’a pénétrée, sans que je m’y attende, un peu comme quand un médecin fait une piqûre en disant « tu vas voir, tu vas rien sentir » ; j’ai eu assez mal. Je crois qu’il a joui pas très longtemps après.
Je crois qu’après on s’est endormis. J’étais soulagée, enfin dépucelée ! On s’est réveillés, j’aurait voulu qu’on discute, qu’on soit peut être potes…
Il est parti après avoir mangé un yaourt, m’a dit un truc genre « salut c’était sympa, à la prochaine ». Je l’ai vu se barrer dans les escaliers, me laissant toute seule comme une conne, dégoûtée de me faire planter si vite…
J’ai été au toilettes pisser, j’avais trop mal, comme si j’avais eu des bleus autour du vagin. Je me suis sentie trop nulle et trop seule.
L’idée que j’avais été violée m’a traversé l’esprit, mais je me disais que ce genre de chose ne pouvais pas m’arriver, moi si forte et grande gueule et vigilante. Et puis lui était cool et anti sexiste et végan, alors…
Alors j’ai appelé ma voisine qui a à peu près mon âge, en pleurant, en lui disant que j’avais fait une grosse connerie, qu’il fallait que je prenne la pilule du lendemain.
Elle m’a envoyé chez le docteur, qui a halluciné. Surtout quand il m’a demandé quel pouvait être les risques qu’il soit séropo ou qu’il ai des MST, et que je lui ai répondu que j’en savais rien, que c’était juste un punk que j’avais rencontré dans un squat.
Par refus de cette image qu’on veut coller aux filles, d’être sentimentales, dépendantes des mecs, etc je me suis construit un rôle suite à cette histoire, je me suis complue à raconter ma première fois comme un truc dont j’avais rien à foutre. « ouais ben ma première fois, elle était nulle mais de toute façons, y a que les cruches qui veulent coucher avec un mec dont elles sont amoureuses »
Aussi, j’ai jamais osé parlé de viol parce que je me sentais débile, débile parce qu’il était plus populaire que moi, débile parce que je l’avais relancé et après j’avais été squatter chez lui quelques jours pendant les vacances et qu’il m’avait à peine calculée, débile parce qu’il me plaisait.
Et puis je me disais que un viol c’est forcément très brutal, et ça se passe dans une rue sombre, par un inconnu,…
J’ai pensé : « si je raconte ce qu’il m’a fait , il se défendra en disant que je suis une pauvre fille, que je suis dégoûtée parce qu’il m’a jetée. » J’en sais rien… j’ai pensé longtemps que j’étais une pauvre fille.

¤ ¤ ¤

Je me dis qu’il y a plein de choses qui doivent sortir, qu’il faut que je règle des trucs. J’ai tellement toujours été flippée par l’idée de ne pas être forte et combative, de me retrouver à la place pourrie de victime, que je ne me suis jamais posée pour me dire que j’avais encaissé des trucs durs.
Encaisser ne m’a pas rendue plus forte. Ça a surtout faussé certains de mes rapports. Avoir l’air « d’assurer » alors qu’on est paumée, ça ne sert a rien.

J’ai revu plusieurs fois le punk. A des concerts, en coup de vent. Je lui ai rien dit. Juste bonjour.
Je ne sais pas si j’ai envie de lui dire ce qu’il a à entendre. Je ne sais pas s’il reconnaîtrait qu’il m’a blessée. J’ai l’impression que c’est tellement courant, tellement comme ça.
Je suis sortie avec des mecs parce que c’était normal. Ça ne m’as pas fait plaisir parce que c’était bon, mais parce que c’est ce qu’on attendait de moi, parce que c’était plus facile. J’ai dragué plein de mecs mignons, couché avec, sans désir particulier à part celui d’être reconnue, de me forger un rôle, celui de la fille sûre d’elle même qui les emballe tous. Et puis leur sauter dessus c’était anticiper sur le moment où eux voudraient me sauter.

Quelle marge de manœuvre j’avais ? Dans pas mal de milieux, et aussi les milieux alternatifs et militants, il faut coucher pour pouvoir l’ouvrir, être reconnue, ou sinon, être suffisamment jolie pour être agréable à regarder (pas à écouter)
Si je dis ça, c’est que je me rend compte que depuis que je l’ouvre mais que je ne « baise plus », il y a un net changement dans les attitudes. J’ai toujours été une grande gueule. J’étais considérée comme ayant du caractère. Le fait d’être un enjeu pour les mecs, d’être jolie et libérée, faisait passer pas mal de mes gueulantes.
Et puis là, ça fait un peu plus d’un an que j’ai décidé de rompre avec la bi sympa que j’étais, chaleureuse, avec qui on pouvais parler de mecs comme de filles, pour me pencher sur mes désirs et enfin vivre des histoires avec des gouines (parce qu’être bi dans un milieu de mecs, ça signifie techniquement être hétéro). Ben là, progressivement, j’ai commencé à être moins avec des mecs, mais à continuer à être comme d’hab’ avec mes potes quand je les voyais. J’ai rencontré des lesbiennes, des bies, j’ai eu des histoires, des ruptures, la vie quoi !
Du coup, ces derniers temps, on me trouve agressive, pas cool, lointaine. Plus assez dispo ? vous avez dit hétérosexualité obligatoire ?
Tout ce que j’ai pris dans la face, que je me suis imposé, c’est à cause de cette pression sociale de merde. Celle qui ne donne le choix qu’entre : être une coincée qui attend le prince charmant / être « libérée » (comprendre : dispo pour les mecs), être vierge ou salope, être LA meilleure ou une victime, être hétéro pour exister/coucher (avec des mecs) pour être reconnue ou être lesbienne pour les faire fantasmer, être cloîtrée (et)ou violée, être bonne, nonne ou conne, …
Maintenant j’accepte de ne plus avoir à prouver aux autres que je suis une wonderwoman active et battante. Je m’autorise à être fleur-bleue, timide, sentimentale, romantique,… Sans pour autant être possessive, hétéro ou en couple.
Je ne veux plus exister par le regard des mecs, ni pour eux, je veux vivre et me construire pour moi, m’éclater. La lutte est longue.
Autant de normes à déconstruire, et moi (nous), là dedans à se construire sans mode d’emploi.
¤ ¤ ¤

Si je me replonge dans cette histoire, quatre ans après, c’est qu’hier, j’ai fais la fête avec des copines. A la fin, j’ai été pisser dans la rue entre deux caisse. Y a un mec avec qui j’avais discuté pendant la soirée qui s’est ramené ; j’ai eu juste le temps de me relever , il m’a touchée, en essayant de mettre ses doigts dans ma chatte. Je l’ai poussé, je crois que j’ai gueulé (je ne me rappelle plus bien > trop picole). Et puis voilà.
Je l’ai dit à mes copines, j’étais un peu speed, mais il était parti déjà, alors j’ai continué la teuf, tout en me donnant l’air détaché. En fait, je pensais qu’avec tous les abrutis que j’ai laissé me baiser, c’était pas ça qui allait m’impressionner.
Et puis là, l’alcool s’est dissipé, la journée est passée, et je me sens mal.
mai 2008
Il y a huit ans, j’avais 18 ans, j’ai rencontré un gars, chanteur d’un groupe anarchopunk en vogue, lors d’un de ses concerts.
Ce garçon, je l’ai dragué, je l’ai ramené chez moi, et je me suis mise au lit avec lui.
Oui j’avais envie, mais « je ne l’avais jamais fait », bref j’étais vierge et je lui ai dit. J’avais pas envie d’en faire un tout un plat, parce que je n’ai jamais cru dans une histoire de prince charmant, qui vient cueillir ma fleur, mais j’avais un peu peur que ça me fasse mal.
Bon, il met une capote, et je ne sais pas si elle était pas assez lubrifiée, ou si c’était moi, mais ça me faisait mal. Genre ça chauffait. Je lui dis de l’enlever. Ce qu’il a fait.
En y repensant, je me dis que je n’ai même pas osé dire : j’ai mal, on arrête ; j’avais mal mais je ne voulais pas me dégonfler, j’ai préféré me mettre en danger.
Finalement, il m’a pénétrée, sans la capote, alors que j’étais sous lui et que je lui disais « attend, attend, aïe, aïe ». Je ne sais plus si je lui ai dit non, mais j’étais assez paniquée, et ça m’a fait très mal quand il est entré.
Heureusement ça n’a pas duré très longtemps, il s’est très vite retiré, juste avant d’éjaculer.
Je crois qu’on a du s’endormir juste après, vu qu’on était bourrés.
Quand on s’est réveillés, la première chose à laquelle j’ai pensé c’est « je me suis faite violer ». Pensée que j’ai tout de suite chassée « mais non, comment peux tu penser ça ».
Il a bouffé un yaourt et il est parti, en me disant « à la prochaine ».
J’ai été aux toilettes, j’ai eu très mal en pissant. Je me sentais nulle, vraiment l’impression de m’être faite baiser. Littéralement.

Après ça, ça a été tous les « effets secondaires »… Gros coup de stress…
Je prenais ma pilule de manière assez chaotique à ce moment, donc gros flip, ma voisine qui est aussi mon amie m’envoie direct chez le médecin, pour que je gère au moins ce qu’il y a à gérer dans l’urgence.
Pilule du lendemain, ordonnance pour faire des examens MST… Je mise sur le fait qu’il a mis spontanément une capote (même si il l’a vite enlevée), pour écarter la possibilité de transmission de sida.
Je suis un peu perdue, l’impression d’avoir fait une grosse bêtise.

Quelques semaines après, je suis en vacances, je décide d’aller voir des potes qui habitent dans la même ville que lui. Je ne sais pas vraiment ce que j’attends, peut être de la reconnaissance. Je me sens encore plus nulle, totalement boulet.

Je pars rejoindre un autre amant. Il est beaucoup plus âgé que moi, rencontré dans un cadre un peu alterno.
Il a une copine et deux jeunes enfants, notre relation un peu clandestine me fait triper…
Enfin, par ailleurs il me dit plein de connerie, genre il a des idées toutes faites sur la libération sexuelle, que toutes les femmes libérées se masturbent (moi je ne me suis jamais beaucoup masturbée), il est super misogyne. Le pire, je crois que ça a été quand il m’a dit que les règles le dégoutaient, que j’ai eu mes règles, et qu’il m’a foutu la pression pour que je mette des tampons, histoire qu’on puisse quand même « faire des trucs ». Moi je n’avais aucun désir, je me sentais coupable d’avoir mes règles et il me le reprochait.
Mais il était fou de moi, alors ça me faisait du bien.

Et puis, je suis rentrée de vacances, j’ai continué mon histoire avec le mec plus âgé, mais de loin, vu qu’on n’habitait pas dans la même ville, et vu sa situation familiale.

Là ça a été le moment de gérer les examens, le dépistage HIV, bref, toutes les joies de l’après.

J’ai été dans un laboratoire d’examens médicaux horrible. Je n’ai appris malheureusement que bien après que il était réputé pour ça.

Mon meilleur ami m’a accompagnée, j’étais complètement flippée. D’abord on devait me faire un frottis.
J’ai fait une crise d’angoisse sur la chaise de gynéco, je me suis rhabillée, et sortie.
Puis mon ami m’a rassurée, et j’ai bien voulu y retourner.
La meuf m’a enfourné un speculum sans ménagement. Je n’avais jamais eu d’examen gynéco avant ça, et je pense que j’avais une mycose (mais ça je ne l’ai pas compris sur le moment, je connaissais très mal mon corps, et surtout mon vagin). Bref, l’espèce de coton tige pour faire le prélèvement m’a fait horriblement mal, et je l’ai très mal vécu.
Après ça a été prise de sang. J’en ai profité pour en balancer plein la gueule à la meuf, qui venait de m’arracher l’intérieur de la chatte.

Et voila, bilan des courses, rien, pas de MST, pas de SIDA, pas de souci.

Et pourtant…

Rien ?

Non, pas rien !

L’année d’après, j’ai fait des folies de mon corps. Je me suis faite piercer le téton. Expérience très douloureuse sur le coup mais qui m’a donné beaucoup de force.
Et surtout expérience choisie !

J’ai eu plein d’amants, je sortais beaucoup, je buvais beaucoup, mais je m’amusais, j’étais en première année de fac, je ne foutais pas grand-chose, et les gens autour de moi était quand même plutôt bienveillants. Une très belle année. J’ai fait n’importe quoi mais je ne me suis pas une fois sentie en danger. Et je crois que je ne l’ai pas été.

J’ai rencontré plein de gens, des milieux squats dans d’autres villes, j’ai rencontré des féministes… Je veux dire, des féministes de mon âge, avec qui j’avais envie de partager.

Je me rappelle très très vaguement d’une discussion, une fois. Une copine parle de M., le punk qui m’a violée quand j’avais 18 ans. Elle raconte qu’il a été limite avec sa copine, qu’il est pas clair avec les filles. Je crois qu’elle prononce le mot viol.
Je ne me rappelle plus exactement ce qu’elle a dit.
Ce que je me rappelle très précisément, c’est d’avoir pensé très fort « ce mec est un violeur, et il m’a violée moi aussi », et juste l’instant d’après « mais non enfin, tu tripe ». Et j’ai fini par lâcher, en me sentant totalement conne : « oh ça craint, t’es sûre que t’es un violeur… c’est le premier mec avec qui j’ai couché ». Point.

Et puis j’ai commencé à y penser. J’ai eu des histoires avec des mecs, un peu plus longues que les plans d’un soir que j’avais enchainé.
J’étais pas toujours à l’aise au niveau sexuel. Globalement ça allait, mais à un moment, ça devenait le blocage total, et je fuyais.

Je ne sais plus trop à quel moment j’ai admis qu’il m’avait violée. Il y a 4 ans je crois… Quand j’ai commencé à militer avec des féministes, que je me suis plus posé la question de mes désirs, que j’ai mieux découvert mon corps, que j’ai appris à l’écouter, et plus à refouler.
Et puis d’échanger, de parler, de se rendre compte qu’on est plusieurs à avoir voulu jouer à « la femme libérée », « pas frigide », alors qu’on a juste été des femmes en libre service.
Qu’on a accepté de faire des choses parce qu’on pensait que c’était normal, ou « comme ça ».
Qu’on était plusieurs à avoir été traitées de salopes quand on avait été moins passives, et qu’on avait eu plein d’aventures sexuelles choisies.

Et puis en devenant féministe, je me suis aussi rendue compte que pleins de gars se disaient féministes, ou pro-féministes, tout en conservant leurs privilèges, en se faisant mousser comme gars « super cool », et en se tapant pas mal de meufs au passage.
Ça me foutait en l’air que des gars utilisent cette force, notre force, pour encore une fois nous embobiner.
J’ai détesté me rappeler que M., le punk violeur, était très bien vu dans les milieux squats, punks, etc. car il était l’antisexiste de service, à faire des dessins qui mettent en scène des meufs militantes, genre tout le monde il est beau au pays des crêtes, genre moi j’ai réfléchi à plein de trucs, chuis pas un bourrin basique, je suis un bon militant.

Je savais pas trop quoi faire, parce que j’avais peur d’en parler, de ressortir un passé pas très glorieux, de minette qui se fait embobiner. J’avais peur qu’on me dise « ouais t’as les boules qu’il se soit cassé, et t’as inventé toute cette histoire pour te venger ». Peut être que oui.
Peut être que si il s’était pas juste vidé les couilles et parti, j’aurais pas relevé.
Parce que nous les filles, on est biberonnées à penser que si l’autre nous aime, tout va bien. Que finalement, notre désir, notre plaisir est secondaire, que ce qui compte c’est d’être aimée.
Dressées à être un réceptacle, à se satisfaire d’avoir donné du plaisir à l’autre, pourvu qu’on nous laisse pas comme une vielle chaussette.

C’est peut être cette ambigüité qu’on porte -préférer être maltraitées que mal vues ou mal aimées- qui fait que j’ai mis tant de temps à en parler, et que je continue d’être mal à l’aise quand on me demande des détails.
C’est le même sentiment que ces meufs qui se sentent flattées quand elles se font siffler dans la rue, qu’on leur lâche un « t’es bonne ». On est tellement lobotomisées qu’on finit par se sentir orgueilleuse d’être considérées… même si c’est être considérées comme un trou.

Finalement M. le punk m’a clairement renvoyé à ma condition de trou, alors que A., le père de famille alterno, a réussi non seulement à me faire penser que j’étais un trou, mais que en plus, c’était révolutionnaire ! Fortiche !
Paris le 10 juin 2008
Il y a deux jour je l'ai vu, toute une soirée, il était là, tranquille.

Et ce soir en farfouillant dans des vieux cd, je retombe sur un texte, écrit il y a quatre ans. Toujours la même période. Début juillet 2000. 14 juillet 2004. 10 juin 2008. Combien de fois quatre ans faudra-t-il pour que je n'y pense plus? Pour que je ne ressasse plus ces questions idiotes...

« Oui, mais il me plaisait, alors était-ce vraiment un viol? »

Quand un garçon nous plait, est on sensée avoir envie qu'il nous viole?

Combien de fois quatre ans à relire des vieux textes qui disent toujours la même chose. Et que finalement toujours personne ne sache. Qu'il soit là, toute une soirée, tranquille?

Combien de fois quatre ans pour oublier que, alors que ça faisait 5 ans et demi, je l'ai croisé par hasard et que j'en ai été malade, j'en ai perdu 5 kilos en une semaine.

Combien de secondes, de minutes, d'heures ai-je toléré sa présence l'autre soir? Pourquoi je n'ai rien dit, rien fait?

Pourquoi les seules personnes à « savoir » sont les personnes avec qui je partage une intimité? Pourquoi c'est un secret, qu'est ce que j'ai à cacher?

9 commentaires:

Anonyme a dit…

Je ne sais pas si je peut dire ça, si ça se dis, mais je suis très fière de toi.

Anonyme a dit…

Voilà un extrait d'un texte que j'ai écrit il y a plus d'un an, qui s'appelle "Viols etc". L'écriture de ce texte ça a été pour moi le début de la compréhension du fait que c'est l'ensemble des relations hommes-femmes qui fonctionnent sur le mode du viol.


"Et je me dis que peut-être si je me faisais violer je me laisserais faire, pour que le violeur soit content de moi.
Une fille peut attacher au jugement du dernier des connards sur elle plus d'importance qu'à sa propre intégrité morale ou physique.
Il faut se battre très fort pour se rappeler qu'on vaut quelque chose, que notre propre estime de nous-même a de la valeur, que nous avons plus de légitimité pour juger de notre propre valeur morale que celui qui nous viole. Je trouve ça horrible, d'avoir été à ce point élevée à me rendre UTILE, à être contente d'être BONNE A BAISER, à leur rendre la tache facile s'il voulaient me violer."


Il faut se rappeler que notre valeur et notre force c'est pas celles que les mecs nous accordent, dans leur système de valeurs à eux, "violable" ou "pas violable".
Notre valeur et notre force c'est celles qu'on s'accorde nous-mêmes, et celles que la lutte et le refus de se soumettre nous donnent, et celles que les autres nanas nous reconnaissent.
Il faut construire des nouveaux systèmes de valeurs indépendants des leurs, et être fières et libres, pour de vrai.

J'suis fière de toi, moi aussi. T'es super forte.

Anonyme a dit…

et moi aussi je me le demande : "est-ce que j'ai été violée?" et je me dit que c'est la honte si je me suis faite violée, que je suis faible, alors que je veux être forte. que quand cette relation ne me plaisait plus, je n'ai pas su l'arrêter. que j'ai rien dit, que j'ai attendu passive que ça se termine, que j'ai continué a sourir et a faire "hhaaa" , que j'ai rien laissé entendre, pour lui. Je crois que ce n'était pas un viol. Mais que ça le frolait et que ça me pose question sur moi et sur ma force.
et surtout, je me damande combien on est à se poser cette question...

Anonyme a dit…

je témoigne.

J'ai vécu un viol, un viol qui m'a fait d'autant plus mal que des personnes auraient pu intervenir, mais qu'elles ne l'ont pas fait.

J'avais 18 ans, après sortie d'HP (pour TS due en partie a des attouchements dans ma préadolescence) et casi un an d'harcellement et de menaces de mon ex, je m'installais dans Mon appartement sécurisé où fallais mettre plus d'un coup de pied dans la porte pour qu'elle s'ouvre. J'avais pour projet d'enfin m'accorder une vie normale, de retourner en cours et enfin arriver a m'accorder cette pensée "j'ai le droit de vivre maintenant".

j'ai fété ca. Un type d'une fête de l'appartement a côté a du entendre du bruit et se pointer a ma porte. J'étais deja bourrée, j'avais envie de l'envoyer chier mais un pote a moi l'a reconnu et m'a dit de le laisser entrer. J'ai pas fait ma farouche.

Seulement j'ai vite commencé a ne pas pouvoir me l'encadrer, qd il a pris ma guitarre, a commencé a frimer pasque c'ets un musicos et par dessus tout, m'envoyer paitre qd je lui demandais de ne pas chanter telle ou telle chanson.
J'ai eu envie de lui savatter la tronche mais c'était la fête, certains chantaient, je voulais pas tout gacher et ballancer ma mauvaise humeur au nez de tout le monde.

Quand il a posé ma guitarre j'ai commencé a souffler, boire et reboire et calmer mes nerfs, jusqu'a ne plus me souvenir que de cela sur la suite de ma soirée:
lui avoir raconté que je sortais de psychiatrie, chialer et hurler que j'étais pas folle, et lui me serrer dans les bras en me disant "non toi tu t'en est sortie".

Dernier souvenir avant de rentrer dans le vif du sujet: je pars seule avec lui raccompagner quelqu'un que je ne connais pas.

Puis me voila couchée, en pyjama, pantalon moitié baissé, dans mon lit, deux amis dorment par terre a coté et je me reveille par deux doigts dans mon vagin. Je ne réagis pas pdt deux minutes, le tps de réaliser puis je commence a sentir la douleur du frottement. Je panique et je hurle de me sortir ce connard d'ici, reveillant un des deux autres que j'envois chier par la même occasion et qui me laisse me demerder. Faut il préciser que je pese 40 kilos et que l'autre était obèse? J'avais mes règles, je paniquais. Il me dit "tais toi" "laisse toi faire" me met la main sur la bouche et me chuchotte toute la nuit "je veux ta chatte".

La suite et parsemmée de trous noires, a tel point que je ne sais pas ce qui s'ets passé exactement dans la fin de cette nuité.
Moi me debattant, finissant par me coller une main entre les jambes, en serrant de toutes mes forces , le repoussant de l'autre mains, le sentir bander, sentir ses mains... finir par pleurer a bout de force.

la fin du calvaire: un portable sonne, il se releve vitesse grand V, je continue de l'insulter, il a le culot de me faire "désolé miss".
Il part si vitte qu'il oublie son calecon entre autres.

Ma tête ne tenait pas droite jusqu'a environs 17h, une fois que j'ai pu la tenir, je ne marchais toujours pas droit.

Les deux autres personnes qui dormaient là se sont éclipsées assez vitte. pendant une heure et demi j'ai reussi a me convaincre que c'était un cauchemard, puis j'ai baissé mes yeux sur mon pantalon taché de sang, je me suis souvenue que j'avais mes règles...

En état de choc je n'en ai parlé qu'a un seul ami. 4 mois après j'ai porté plainte: il savais où j'habitais et je n'étais donc plus en sécurité chez moi, j'ai porté plainte par égoisme, pour moi et personne d'autre.

Il n'a eu qu'a dire que j'étais consentante pour que l'affaire soit classée sans suite.

Et depuis?
Je ne me serai jamais crue assez forte pour supporter les amis qui me laissent tomber et la famille qui une fois au courrant a essayé a tous prix de l'etouffer et le nier.

Je me conforte parfois en me disant que de toute façon je ne croyais deja pas en la justice avant de porter plainte et que ce type doit vraiment être une sous merde pour avoir a violer pour baiser.

Que dire? je n'en sort pas indemne, mais je n'ai pas laissé tomber cet objectif qui est de m'accorder le droit de vivre et même de vivre heureuse; mais je ne supporte toujours pas cette idée qu'il soit heureux qd moi je galère pour m'accorder ce droit.

Ce n'étais pas ma premiere fois et pourtant je n'arrive pas a immaginer pour le moment d'avoir d'autres relations sexuelles, j'ai peur de les vivres comme un nouveau viol, me sentir faible et sans défense à nouveau...

Encore bravo a ceux qui parlent, ca ne resoud pas toujours les choses mais il est sur que se taire c'est le meilleur cadeau qu'on puisse faire a ces connards.

Anonyme a dit…

Ben ouais, on est beaucoup... Et il faut le dire et le redire pour que ce soit plus facile à dire pour les suivantes. Parce qu'il y en aura d'autres encore et encore. Moi, j'avais 16 ans, peut-être 17. Quand je voulais sortir, je savais qu'il me fallait dormir chez quelqu'un (plus de bus passée une certaine heure). Et curieusement, une jeune fille trouve toujours un garçon plus âgé pour l'héberger, et c'est jamais tout à fait gratuit, une fille l'apprend vite aussi. Ca fait sans doute partie de ce qu'un connard des Lumières appelle "le contrat social", non? C'est déjà assez dégueulasse comme idée mais on s'y fait ou on n'imagine pas vraiment que les choses puissent se passer autrement. De l'apprentissage précoce du continium prostitutionnel. Et puis une nuit, G. propose donc de m'héberger. Je le connais, j'ai plutôt confiance, j'ai même flurté avec lui quelques mois plus tôt. Nous nous couchons. Il tente sa chance et je l'éconduis. Je m'endors dans un coin du lit, le plus loin possible pour appuyer mon refus. Et puis je me réveille, avec lui sur moi, à deux doigts (sans mauvais jeu de mots) de me pénétrer. Et c'est fou ce qu'on peu être conne et manquer d'assurance à 17 ans, avoir si peu confiance en sa propre légitimité. J'ai eu peur d'avoir l'air jeune et niaise et farouche et je ne sais quoi encore... Je me suis dit qu'il n'avait pas remarqué que je dormais, que c'est moi qui serais ridicule si je lui disais non à ce moment là. Je tiens à préciser que ce mec n'avait pas loin de 30 ans. Et j'ai rien dit, j'ai attendu que ça passe, j'ai pas bougé. Le pire, c'est que ça conditionne la sexualité après. Ca fait qu'on n'a pas beaucoup de respect pour soi ni pour l'autre, pas très confiance non plus. Après ça, j'ai vraiment accumulé les relations sexuelles merdiques, j'ai rejoué cette situation de nombreuses fois. La sexualité, c'était ça pour moi. Jusqu'à ce que je rencontre le féminismes et des féministes, ce qui n'a pas tout réglé, loin de là mais qui m'a permis de comprendre que ce n'était pas ma faute et que j'étais loin d'être la seule. Cette histoire date d'il y a environ 10 ans et il y a 4 ans, j'ai croisé G. et je l'ai frappé, je l'ai fait sortir du bar ou j'avais décidé de passer la soirée. Ca m'a fait du bien mais il n'a rien compris, je crois que lui ne s'en souvenait même plus.
Mais, dans cette histoire, le plus difficile n'a sans doute pas été le moment même mais cette gène et ce malaise qui est resté pendant longtemps. Pire encore, le moment ou j'ai accepté de mettre le mot viol dessus, parce que ça faisait de moi une victime. Mais je suis assez d'accord avec Despantes dans King Kong Théorie, qui dit que même si c'est dégueulasse, c'est un risque à prendre quand on est une fille qui ne se soumet pas à ce qu'on attend d'elle, quand on est une fille qui sort la nuit, qui boit... Et en attendant le jour ou ça ne constitura plus un rique, je continue à le prendre et ne cesse d'apprendre à me défendre.

Anonyme a dit…

Je sais pas comment commencer, peut être en te félicitant de cette initiative car il y en a vraiment besoin.
Ensuite à redire qu'on est beaucoup, voire toutes à connaître, si ce n'est le viol, en tout cas le rapport sexuel et particulièrement le coït hétéro non voulu (après à voir ou on met la barrière entre les deux). Car combien d'entre nous ont connu ce moment où on n'a plus envie mais on continue parce qu'on n'ose pas, pour des milliers de raisons, dire qu'on veut arrêter, parce qu'on a peur ou qu'on culpabilise, ou les deux. Combien d'entre nous ont connu ces moments où on fait tout pour le satisfaire, pour qu'il jouisse plus vite et que ça dure moins longtemps pour nous.
Et surtout qu'on vienne pas me dire que les mecs antisexistes et qui y ont réfléchi, ils font pas ça. Qu'on ne vienne pas nous dire que dans les milieux alterno, ça ne se passe pas. Qu'on ne vienne pas me dire que c'est que les salops, les monstres, les anormaux, les vrais machos qui font ça. Non c'est les mecs, pas tous sûrement, mais c'est plutôt ceux là les anormaux. Car ils ne se demandent même pas si on a vraiment envie. Ils s'en foutent juste. Ils ont appris à s'en foutre et ils ont tout à y gagner, leurs privilèges de mâles etc, à s'en foutre.
Nous, on s'en fout pas.
Alors oui Bravo pour ce blog, qu'on en parle, qu'on partage, qu'on montre...
Bravo, encore bravo

Anonyme a dit…

salut..
effectivement c'est une chouette initiative!
je vous signale un texte sur infokiosques, c'est "juste une histoire de fille".
c'est un temoignage d'une longue relation hétéro galère et de la gestion des oppressions qu'a subie la fille..
a biento!

Anonyme a dit…

c'est bizarre à dire. mais ça fait du bien. de te lire. de vous lire. que ça sorte du placard.

ma première expérience ressemble par certains points à la tienne.
En tout cas cette impression d'avoir à "passer par là" c'est la mienne aussi, l'obligation du coït,d'être disponible pour l'homme.

j'aimerai qu'aucune n'ai à ressentir ça.

ça me file la haine que ça existe.

je vous trouve courageuses et fortes. et ça fait du bien.

Anonyme a dit…

c'est vrai que c'est sérieusement crapuleux comme histoires, et que c'est désastreux que vous ayez eu à subir des relations pareilles. Heureusement que tous les gars du milieu punk/squat/alternatif etc ne sont pas comme ça. Mais faut pas se cacher les yeux, il y a des connards partout.

En mars dernier, j'ai passé une soirée dans un squat que je connaissais bien. Je suis sortie avec un gars, un mec de la rue que je connaissais déjà depuis un petit moment, qui a été adorable avec moi. C'était un samedi. Le mardi suivant je repasse au squat le voir. Je rencontre un punk que je n'avais jamais vu, sympa cool etc en apparence. Je pars discuter un peu avec le gars avec qui je sortais, pour lui parler de ma vision des relations etc, que je suis pratiquante de l'amour libre. Il l'accepte, il est comme ça aussi. Et il m'a dit LE truc dont je ne me serais jamais méfié. Le sympathique punk inconnu qui payait tranquille sa binouze dans la pièce voisine a tenté de rentrer dans les chambres des nanas pendant la nuit, tout bourré. Je suis sincèrement reconnaissante envers mon ex de m'avoir prévenu.

Ce jour là j'ai compris que comme partout, il y a des gros gros connards dans ce milieu, mais également, et même une majorité, de gens qui veillent sur les autres autant, voir plus, que sur eux.